Tunnel du soir

Comment parvenir à le traverser sans (trop) de stress ?

Ah ce tunnel du 18h-20h… Récupérer les enfants puis enchaîner sur les devoirs, le bain, le dîner, le coucher. Le tout dans un temps défini, avec pour maître-mot le calme et l’harmonie 🙂

Ça, c’est souvent ce qu’on espère. Mais on est parfois rattrapé par une autre réalité.

Alors pourquoi ces deux heures sont souvent vécues comme les plus difficiles de la journée pour les parents ? Que se passe-t-il et comment faire pour que ce temps soit vécu plus sereinement par les parents et par les enfants ?

Prenons en compte tout ce qui se joue d’abord pour vous, parents.

Vous venez de terminer votre journée de travail, enchaînant les rendez-vous clients, la demande urgente du boss, la réunion d’équipe qui s’éternise alors que vous avez encore une to do longue comme le bras. Pour peu que votre collègue avec qui vous deviez faire la présentation du lendemain soit absente, ça a été les montagnes russes du stress pendant toute la journée. Alors le soir, en rentrant à la maison, vous êtes un peu à plat – voire encore très tendu(e) – et espérez pouvoir souffler un peu, penser à autre chose.

Mais vous le savez déjà, vous allez être en flux tendu jusqu’à ce que vos enfants soient endormis. Vous anticipez déjà les disputes qui se profilent avant même de passer le pas de la porte. Pourtant, votre timing est bien défini, si tout se passe bien, la soirée s’annonce fluide. Mais au moindre grain de sable, ça déraille.

Votre objectif de maman ou de papa, c’est – en général – que chaque étape se passe dans le calme (faire ses devoirs, être propre, avoir mangé, se brosser les dents, bouquiner, s’endormir).

Or, à peine avez-vous retiré les clés de la serrure que les premières revendications pour éviter le bain se font entendre. Puis le repas ne correspond pas à ce qui était espéré ou promis. On enchaine avec le brossage de dents qui finit en feu d’artifice sur le miroir de la salle de bain, et le nombre d’histoires n’est évidemment pas suffisant. Le petit dernier qui se relève 15 fois pour vous raconter un dernier truc sur sa journée et avoir un verre d’eau. A 22h, vous êtes enfin relax sur le canapé, mais épuisé par cette double journée.

Je grossis le trait exprès…ou pas !

Mais alors, pourquoi ça déraille à ce point ?

Regardons maintenant ce qui se passe pour votre enfant.

Tout comme vous, il a vécu une journée stressante et intense. Il a dû rester assis une bonne partie de la journée alors qu’il n’aurait voulu qu’une chose, courir et sauter. Il s’est concentré pour écouter les consignes de la maîtresse, et malgré ça, il n’a peut-être pas réussi à être à la hauteur de ses propres attentes ou de celles de la maîtresse. Il s’est sociabilisé, a géré des conflits avec les copains, des frustrations, des injustices. Il s’est tenu et contenu toute la journée. Quand vous rentrez, ses batteries sont à plats elles-aussi, il a besoin d’ouvrir les vannes, de décharger tout ce qu’il a vécu. Et c’est avec vous, sa figure d’attachement, qu’il peut le faire. Il a besoin de votre attention. Alors il la cherche, par tous les moyens.

Vous rentrez stressé et les batteries à plat, il rentre stressé et les batteries à plat.

Alors, comment on fait pour éviter les tensions ?

D’abord et avant tout, on recharge les batteries de tout le monde. En tant que parent, il est possible de trouver un petit truc qui nous reboost avant de franchir le pas de la porte. Ça peut être écouter une musique qui nous fait du bien, faire une partie du trajet à pieds (quand c’est possible) pour se reconnecter avec la nature ou respirer l’air frais, prendre 5 minutes pour une relaxation devant le pas de la porte, appeler une copine sur le trajet, etc. A vous de trouver ce qui vous fait du bien ! Et vous permet d’être disposé à accueillir ensuite les besoins de votre enfant.

On retrouve ici l’image assez parlante du masque à oxygène dans les avions. En cas de dépressurisation de la cabine, il est demandé de s’équiper du masque à oxygène avant d’équiper son enfant. C’est un peu la même chose dans le tunnel du soir. Pour être à même de s’occuper des différents besoins de son enfant, il faut être en capacité d’être disponible pour lui et donc avoir pris soin de son propre besoin avant.

Ensuite, on va pouvoir recharger la batterie affective de son enfant. Il a besoin d’être en lien avec vous, il ne vous a pas vu de la journée et cherche un moment de qualité avec vous. Les parents que je reçois me disent souvent « mais je passe du temps avec elle, elle joue à côté de moi pendant que je regarde mes mails ou que je finis de préparer le diner ». Votre enfant a besoin d’un temps « avec », pas seulement « à côté ». Ça ne veut pas dire jouer pendant une heure et finir par se coucher trop tard. C’est simplement un temps dédié pour votre enfant, même 10-15 minutes, pendant lesquelles vous êtes à 100% avec lui et rien qu’avec lui (exit le téléphone, le repas à préparer, le petit frère qui s’en mêle, etc.). Si vous avez plusieurs enfants, il est important de notifier ce temps dédié clairement, à tous les membres de la famille. Soit vous avez le temps de passer un temps dédié avec chacun de vos enfants tous les soirs, soit vous alternez les soirées. Mais il est primordial que le planning et la durée du temps avec chacun soit claire et énoncée en amont. Et équitablement réparti, histoire de ne pas se rajouter une nouvelle dispute !

Afin d’éviter les débordements émotionnels de vos enfants, il est également important d’établir des routines, dans un cadre clair, connu et compris par tous. La routine rassure et permet aux enfants d’anticiper ce qui est attendu sans être pris par la surprise. Pour les plus jeunes, les tableaux de routines peuvent être très utiles. Mais pour les plus grands, même les ados, rappeler les habitudes de la famille peut aussi éviter des rebellions. Et pour que les enfants soient d’autant plus enclins à respecter ce cadre, n’hésitez pas à les faire participer à sa construction. « A ton avis, qu’est-ce qu’on devrait faire après le diner ? » En ayant participé, il se souviendra avoir dit de lui-même « on se brosse les dents » et ira plus volontiers se les brosser.

Enfin, après avoir vu tout cela, il me reste un dernier conseil : LACHEZ LA PRESSION et DECULPABILISEZ. Je vous invite à réfléchir à votre priorité du jour, et ce sur quoi vous êtes prêt à lâcher-prise. Est-ce important pour vous que vos enfants prennent leur bain tous les jours ? Que se passe-t-il si vous prenez des repas surgelés de temps en temps ? S’il prend sa douche après le diner au lieu de la prendre avant comme il le souhaiterait, est-ce que cela va vraiment être problématique ? Leur chambre doit-elle être impeccablement rangée tous les soirs ?

Vous seul avez la réponse à ces questions. Voyez ce qui est vraiment important pour vous, et autorisez-vous à lâcher sur le reste de temps en temps. Cela pourra vous permettre de profiter pleinement de la relation avec votre enfant, sans être parasité par des problématiques matérielles ou organisationnelles.